Le personnel des urgences du CHU de Nantes a décidé de se mettre en grève.
4000 soignants de pédiatrie ont écrit au gouvernement afin de l’informer de la situation catastrophique causée par une épidémie de bronchiolite précoce.
Depuis cet été, de nombreux services d’urgence ferment leurs portes la nuit (sauf pour les urgences vitales).
De nombreues unités ont été obligées de fermer des lits, que ce soit en France (voir cet article) ou au Québec. (voir cet article) Les soignants quittent leur boulot, démissionnent, et vont voir ailleurs, et la tendance ne va pas s’arranger.
Nul besoin de chercher très loin les raisons de ce fiasco, de ce désastre épouvantable. Nous voici au seuil de la catastrophe. Le plus terrible, c’est que celle-ci est annoncée depuis au moins trente ans par tous les professionnels de la santé. Mais les gouvernements successifs ont préféré fermer les yeux sur ces appels de détresse. (D’ailleurs, peut-être que la catastrophe hospitalière en cours préfigure la catastrophe climatique qui nous pend au nez, étant donné que là aussi l’inaction générale aggrave le cas) Depuis trente ans, on demande aux soignants de se dévouer et de faire des efforts. Ce qu’ils ont fait. Puis la pandémie est arrivée. Cette pandémie, nos systèmes ne pouvaient pas y faire face, ni humainement, ni matériellement. Pourtant, les soignants n’ont pas rechigné. Ils ont été au bout de leurs limites, les ont dépassées, jusqu’à mettre leur propre santé en jeu. Et puis, la pandémie a reculé et tout est redevenu “normal”. Affreusement, tristement “normal”. La normalité d’un monde qui pète les plombs. Ces efforts exigés et consentis au nom de la collectivité et des valeurs humaines, des valeurs dont notre société se fout de plus en plus ouvertement, préférant faire miroiter la réussite individuelle et la loi du fric, ces efforts n’ont pas été remerciés, ni même valorisés. Les vagues successives ont été vécues comme un traumatisme par tous les soignants, et une certaine rancoeur est sans doute née, qui est passée sous les radars des décisionnaires et qui explique selon moi en grande partie ces démissions.
On a renvoyé les soignants à de vagues promesses, et on s’est bien tenus de prendre en compte leurs cris d’alarme, les reléguant en troisème ligne, derrière la baisse du pouvoir d’achat, l’immigration ou d’autres thématiques davantage vendables. Comme si depuis deux ans, on n’avait rien appris, rien compris. Que la base de tout, c’est la santé. Et que la promouvoir et la protéger devrait rester la priorité numéro 1. Tant pis si on paye des impôts pour ça, ou plutôt, tant mieux. À quoi ça servait de confiner la population pendant deux ans, si c’était ensuite pour laisser tomber les soignants et laisser les hôpitaux s’auto-détruire ? Pourquoi a-t-on fait tout ça, pourquoi ? Où est la logique, et allons plus loin, la logique est-elle encore de mise dans ce monde qui perd totalement les pédales ? (qui les a en fait perdues depuis longtemps).
Nous voici devant le fait accompli, face au constat d’accident : le système de santé est brisé. Démoli par manque de personnel. À qui la faute ? On n’en est plus là. L’heure n’est plus à trouver les responsables. Ce qui compte, c’est de sauver des vies. Il y a urgence, mais on le répète depuis trop longtemps et le mot a été vidé de son sens.
Poser un diagnostic, c’est très bien. Mais existe-t-il un traitement ? Une chose est certaine, ce n’est pas à coup de plans blancs, de réquisitons de personnel ou d’injections de quelques millions qu’on va s’en sortir. Il faudrait tout remettre à plat et récurer les processus de management dans les hôpitaux. En clair : redonner le pouvoir aux soignants. Revoir leur formation. Les valoriser, les motiver, et surtout mieux les préparer. Il n’y a pas de recette miracle, cela va demander du temps.
Mais il faut enclencher le processus immédiatement.